Michel Ferron vient de publier son troisième livre (sans vouloir oublier ses multiples écrits divers et variés, y compris sur ce site internet). C’est un premier roman, et autant l’écrire franchement, certains s’inquiétaient un peu avant la lecture. Un ancien élu politique (conseiller général), toujours responsable associatif (Président de la Maison de l’Europe* et bien d’autres engagements), professeur agrégé de lettres modernes (et on le reste toute sa vie…) peut-il devenir un vrai écrivain ? Et peut-on avoir envie, et même du plaisir, à le lire ? Sans hésitation, les réponses sont positives.
Un roman
Sous ce drôle de titre « Le vieil ours, l’antilope et la gazelle », Michel Ferron livre une fiction immergée dans la classique problématique de la vieillesse. Le personnage principal, Jacques Laurent, un ancien médecin généraliste, a décidé de vivre séparé de sa femme, dans une résidence pour seniors à Bénodet. Christine, l’épouse aimée, ancienne infirmière, est atteinte de la maladie d’Alzheimer, et vit dans une unité médicalisée à une trentaine de kilomètres. Mais le personnage féminin important est Lénaïck, leur petite fille, adoptée après un drame de la route, devenue journaliste.
Il n’y a pas d’intrigue, ni meurtre, ni lourd secret familial, mais une tendre tranche de vie de ses trois là. Une histoire d’amour et de bonheur de vivre, malgré ou plutôt avec la vieillesse. Ces beaux personnages nous en font rencontrer d’autres. Mahmoud, un Palestinien, dont Lénaïck s’est éprise. Hélène, une résidente sortant de d’une dépression, qui reprend goût à la vie et reste toujours très désirable. Un ancien collègue de Jacques, sans nom, mais dont les funérailles permettent une longue réflexion sur le sens de notre existence.
Michel Ferron ne se présente pas comme « écrivain » mais comme « quelqu’un qui écrit ». Cette posture lui permet de s’essayer à des genres différents. Pourquoi pas demain, un essai ou un polar.. ?
En tout cas, même avec des personnages de création, c’est forcément un peu de sa mémoire que Michel Ferron transforme en mots.
Ainsi, le personnage de Mahmoud, journaliste palestinien lui permet de revenir sur la situation compliquée de Jérusalem et du Moyen-Orient qui continue à le préoccuper depuis plusieurs séjours dans cette région. Il y a des belles pages, sans tourisme impudique, avec le reportage de Lénaïck sur les Bédouins Jahalin.
Michel Ferron a été, pendant 11 ans conseiller général (on dit maintenant « conseiller départemental »). Dans cette fonction, il a apporté tout son humanisme bienveillant notamment au sein de la commission « personnes âgées et handicapées », et cette expérience lui a été très utile pour ce livre. De même pour sa participation plus récente aux ateliers d’écriture mis en place à la résidence Korian à Bonchamp. Sans vouloir dévoiler de scoop, la résidence-seniors de Jacques ressemble d’ailleurs comme une sœur à un établissement de Montsurs dont il a été longtemps membre du Conseil d’Administration.
Il y a aussi la passion des édifices religieux, celle du Finistère-sud, la fascination pour une journaliste célèbre, et des morceaux d’histoires familiales intimes, que chacun découvrira ou non. Mais la méconnaissance de l’auteur ne met pas en cause l’intérêt de la lecture.
Jacques et Michel
Pour un lecteur de Bonchamp, impossible néanmoins de ne pas voir certaines ressemblances frappantes entre le personnage central et l’auteur. Il faut beaucoup de distanciation, et d’humour, à Michel pour qu’il donne à Jacques certains traits de caractère qui lui ont été parfois reprochés avec plus ou moins de mauvaise foi, le transformant en « enseignant austère et distant ».
Rapidement, Jacques se fait d’ailleurs surnommer « Monsieur le Professeur » par les autres résidents.
Et puis surtout, il y a les cheminements d’un littéraire qui s’assume comme tel. Les discussions autour de livres, « L’amant de Lady Chatterley » et « Le hussard sur le toit », illustrent avec légèreté et profondeur les relations avec Hélène. La citation finale d’Albert Camus (in « Retour à Tipasa »), qui figure en bonne place dans le panthéon littéraire de Michel éclaire l’histoire romanesque.
Comment ne pas voir non plus que Michel Ferron souhaite, comme ses illustres prédécesseurs, devenir le médiateur des émotions, angoisses ou fantasmes de ses lecteurs ? C’est une belle ambition. « Le vieil ours, l’antilope et la gazelle » peut devenir une occasion d’échange et de partage, c’est tout le le bien que l’on peut souhaiter à cet ouvrage.
Pratique :
125 pages, vendu 14,90 €, édité à 1 000 exemplaires par les éditions Sydney Laurent.
Disponible dans de nombreuses librairies proches : FNAC, M’Lire, « Presse et Livres » à Laval, Librairie du Marais à Mayenne, M’Lire à Château-Gontier.
Vous pouvez aussi le trouver à Bonchamp au bar-presse « Le Central » et au magasin Ecomarché.
Le Court Circuit organise une rencontre dédicaces vendredi 15 févirer de 17h30 à 19h30 aux Epiés lors d’un marché.
Le site-Internet de Michel Ferron à découvrir : http://pelemele-mf.fr/
* lire son interview là : https://www.bonchamp-ensemble.fr/michel-ferron-bonchampois-europeen-elu-president-de-maison-de-leurope-mayenne/
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