En raison de sa non-compétence en matière de santé publique, l’UE risquait d’apparaître impuissante pour tenter de maîtriser la pandémie.
Pourtant, après avoir mis en place un important plan d’assistance pour aider les pays défavorisés à lutter contre l’endettement public, elle n’a pas manqué d’intervenir en exerçant sa fonction de coordination des politiques nationales de santé définies par les Etats membres.
Ainsi, au nom de l’idéal communautaire de solidarité, l’UE s’est investie dans une stratégie vaccinale collective, en affirmant sa volonté de régulation, face à la pratique de certains pays négociant pour eux-mêmes leurs propres contrats avec les groupes pharmaceutiques.
Après avoir engagé des moyens financiers conséquents (plus de 2 milliards d’euros) dans la recherche de vaccins, en définissant le cadre juridique et scientifique de leur utilisation, l’UE a pu procéder à des achats centralisés et maintenir son objectif ambitieux d’une vaccination de 70% de la population adulte totale d‘ici l’été.
Plus encore, l’Agence Européenne du Médicament a joué récemment un rôle d’arbitrage dans l’analyse des effets secondaires de l’Astra Zenecca, manifestant ainsi une compétence de fait, reconnue sur le plan mondial.
Enfin, l’UE a élargi sa politique de solidarité au-delà des frontières du continent européen, en participant avec l’OMS au dispositif Covax conçu pour permettre aux pays les plus pauvres d’accéder à la vaccination.
Certes, tous ces engagements se sont accompagnés d’insuffisances et de dysfonctionnements. Mais, l’on peut affirmer avec Christian Lequesne (dans son éditorial Covid : l’Europe, la bonne échelle – OF 26.03.21) : « Le Covid 19 a été un test grandeur nature… », permettant d’évaluer les conditions d’exercice de la souveraineté européenne. A défaut d’une crédibilité non encore aboutie de son pouvoir politique, une Europe de la santé est en voie de construction. (N’assurait-elle pas déjà de fortes compétences dans le domaine de l’environnement, sur des questions ayant des incidences sur la santé : qualité de l’eau, de l’air ainsi que dans le domaine de la santé et de la sécurité au travail ?)
N’en déplaise aux sceptiques et aux tagueurs anonymes propageant l’obscurantisme, la réaction de l’UE face à la crise sanitaire est la seule manifestation de résistance de dimension internationale qui ait contribué à la prise de conscience des enjeux planétaires de l’épidémie.
Les leçons à tirer de ces constats sont toujours les mêmes, à la dimension des enseignements que l’on peut retenir de toutes les crises. Avec la pandémie, on mesure clairement qu’on ne peut répondre efficacement qu’en réclamant encore plus d’Europe et plus de solidarité et que l’ère du « tout-national » est irrémédiablement révolue.
A l’occasion du prochain lancement de la Conférence sur l’Avenir de l’Europe, qui se propose d’organiser une consultation de grande ampleur, les citoyens auront l’opportunité d’exprimer leur vision sur l’évolution future de la construction européenne.
La France elle-même se retrouvera en première ligne, lors du premier semestre 2022, qui coïncidera avec la durée de la Présidence française du Conseil de l’UE. Ce sera l’occasion privilégiée pour la communauté nationale de peser dans ce débat, à un moment, il est vrai, où les esprits seront accaparés par une élection présidentielle nettement plus mobilisatrice …
Oui, il faut absolument effacer le spectacle infamant de l’humiliation symbolique imposée par le sultan Erdogan à une Présidente de la Commission européenne, reléguée sur un coin de sofa ! Oui, l’Europe doit désormais s’asseoir à la table des grandes nations, dotée d’une réelle autorité politique et reconnue comme une puissance à part entière.
Comme chaque année, le 9 mai, nous célébrons la Fête de l’Europe en commémorant la déclaration fondatrice de Robert Schuman. Il est temps, 71 ans plus tard, de s’atteler à la mise en place d’une gouvernance collective, exprimant une communauté de destin et de valeurs.
« L’Europe ne se fera pas d’un coup, ni dans une construction d’ensemble : elle se fera par des actions concrètes … » (Robert SCHUMAN, 9 mai 1950)
Michel FERRON, Président de la Maison de l’Europe en Mayenne
Commentaires récents